L'expansion du Duanju en Inde
- Blessing Azugama
- 3 oct.
- 3 min de lecture
L’Inde entre sous les projecteurs de la vague mondiale du micro-drame, avec des startups locales, des majors du streaming et des investisseurs internationaux qui se ruent tous sur la promesse d’histoires sérialisées, conçues pour le téléphone, racontées en seulement deux minutes par épisode. Ce qui a commencé comme une expérience inspirée par le succès fulgurant de la Chine est en train de devenir l’une des tendances de divertissement à la croissance la plus rapide en Inde.
Ces drames courts, parfaits pour le visionnage en rafale, d'une à deux minutes, se terminant par des cliffhangers destinés à accrocher le spectateur à l'épisode suivant, sont devenus un enjeu majeur du marché des contenus. Des startups comme Flick TV, Eloelo, Kuku FM, Chai Shots et ReelSaga construisent des plateformes dédiées à ces histoires, tandis que des acteurs plus importants, notamment Amazon, ShareChat et Zee Entertainment, testent leurs propres offres de micro-drames.
Manohar Charan, directeur financier de ShareChat, a déclaré qu'au cours des trois derniers mois seulement, 15 millions d'utilisateurs ont consommé des courts-métrages dramatiques sur Moj et Quick TV, avec plus de 100 millions d'épisodes visionnés quotidiennement. « L'objectif final est d'avoir la plus grande base d'utilisateurs », a-t-il noté, soulignant que la narration sérialisée de qualité professionnelle est ce qui distingue les micro-drames des clips courts et déconnectés qui dominent Instagram Reels et YouTube Shorts.
Les investisseurs le remarquent. Flick TV, basée à Bengaluru, a levé 2,3 millions de dollars auprès de Stellaris Venture Partners au début du mois, tandis que ReelSaga a attiré 2,1 millions de dollars en mai auprès de Picus Capital. Chai Shots, basé à Hyderabad, serait sur le point de conclure un cycle de financement de 5 millions de dollars. Mayank Jain de Stellaris explique l'attrait : « Les micro-drames promettent le meilleur des deux mondes, des formats courts qui correspondent à la réduction de la durée d'attention, mais avec un engagement émotionnel et des récits structurés auxquels les utilisateurs s'attachent. »
De grands groupes de divertissement se lancent également. Amazon MX Player diffuse déjà MX Fatafat, une série de mini-séries construites autour d'épisodes de deux minutes. Zee Entertainment s'est associé à Bullet, une startup de content-tech, pour lancer une application de micro-drames ciblant les jeunes publics au sein de son écosystème Zee5. Pendant ce temps, Eloelo se prépare à lancer Story TV, et ShareChat a déployé Quick TV comme plateforme payante pour des drames et des films. Kuku FM, mieux connu pour la narration audio, s'est récemment étendu à la vidéo avec Kuku TV. Ces mouvements signalent non seulement une expérimentation, mais les débuts sérieux d'un nouveau marché.
La plus grande question est celle de la monétisation. L'industrie indienne du divertissement est confrontée à un faible revenu moyen par utilisateur (ARPU), ce qui rend plus difficile la pérennisation de nouveaux formats. Flick TV mise sur un modèle de micropaiement par épisode avec la possibilité d'évoluer vers des abonnements. ShareChat explore un mélange de publicités et d'abonnements, estimant que les micro-drames pourraient représenter une part « moyenne à élevée » de ses revenus d'ici 18 mois.
Les coûts de production chutent considérablement grâce à l'IA générative, qui est désormais utilisée pour le scripting, le storyboarding, le doublage et le montage. ShareChat estime que les coûts ont diminué jusqu'à 75 % en deux ans, rendant l'expérimentation avec le volume et la vitesse plus viable. Pourtant, tout le monde n'est pas convaincu. Des plateformes comme Pratilipi restent en retrait, préférant attendre que le battage médiatique se calme et que le marché se consolide avant de se lancer dans les drames verticaux.
Quelle est la prochaine étape ?
La scène indienne du micro-drame n'en est encore qu'à ses débuts, mais elle attire déjà des millions de vues quotidiennes, des millions de dollars d'investissement et l'adhésion de startups et de géants des médias. Si l'expérience de la Chine est une indication, la prochaine phase consistera à affiner les modèles commerciaux, à fidéliser les publics et à prouver leur pérennité au-delà du buzz initial. Pour l'instant, l'Inde semble en passe de devenir le prochain banc d'essai majeur mondial pour déterminer si la fiction de deux minutes peut se transformer en une entreprise mondiale durable.
Article rédigé par Blessing Azugama
Source
Economic Times, 17 juin 2025